“Cette technologie permet de relier le cerveau à un dispositif externe”
Il n’y aura bientôt plus besoin de manette pour jouer aux jeux-vidéo, seul votre esprit sera bientôt nécessaire. “C’est possible grâce à une nouvelle technologie que j’utilise dans mon laboratoire, les interfaces neuronales, que vous avez sûrement vu dans la série britannique Black Mirror. Cette technologie permet de relier le cerveau directement à un dispositif externe comme les ordinateurs ou un jeu vidéo grâce à des électrodes cérébrales”, explique Lina-Estelle Louis, chercheuse en neurosciences. “Depuis la découverte des neurones miroirs dans les années 90, nous savons que les mêmes zones cérébrales sont activées lorsque je pense à mon mouvement ou lorsque je réalise réellement ce mouvement.”
Ainsi, penser le mouvement que l’on veut réaliser suffira à faire bouger le personnage dans le jeu. Mais cette technologie est encore très limitée. “On peut uniquement imaginer 4 possibilités au niveau des pensées. Le fait de tourner à droite, d’aller à gauche, d’aller tout droit et de faire une pause. Donc par rapport au jeu qu’on va utiliser, ça peut être un personnage qui navigue dans un environnement ou une voiture. Mais on ne peut pas imaginer beaucoup plus d’interactions comme les jeux de combat qui nécessitent un peu plus d’actions de la part des joueurs.”
“Des startups veulent diminuer les coûts et la rendre disponible pour le grand public”
De nombreux laboratoires de neurosciences travaillent à mieux décrypter la pensée en observant l’activité du cerveau. Les possibilités de jeu pourraient augmenter avec les connaissances. Surtout que le jeux vidéo peut aussi être utilisé comme une sorte de thérapie dans des cas précis. “Dans mon laboratoire de recherche on utilise cette technologie à des fins de rééducation pour que les patients et patientes ayant des troubles au niveau cognitifs puissent activer ces zones cérébrales, donc on va utiliser le jeu vidéo pour inciter à activer ces zones motrices”, explique Lina-Estelle Louis.
Il y a deux possibilités pour mesurer l’activité de ton cerveau et récupérer tes données cérébrales : soit poser un casque sur le crâne de la personne, cela s’appelle un électroencéphalogramme ou EEG, soit implanter des puces électroniques directement dans le cerveau avec une chirurgie. “Pour l’instant, ces technologies sont disponibles uniquement pour les laboratoires de recherche ou des entreprises car le prix est très élevé. Mais des startups sont en train de regarder pour diminuer les coûts, comme miniaturiser la technologie et la rendre disponible pour le grand public”, détaille la chercheuse.
“Plusieurs entreprises sont sur le coup, notamment celle d’Elon Musk qui s’appelle Neuralink et qui a mis en scène dernièrement le fait d’écrire avec un ordinateur ou de jouer à un jeu vidéo uniquement par la pensée. Avec un objectif clairement affiché : celui de faire des tests chez des êtres humains très prochainement. Cette technologie est prometteuse, par contre il y a un flou juridique, il est important qu’on se penche sur le côté législatif, donc au niveau des lois, concernant l’éthique et la morale.” Et pour cause : l’activité de notre cerveau pourrait aussi être un produit commercial, un peu comme sur internet où les plateformes récupèrent nos données pour les utiliser et les revendre. Le Chili est le tout premier pays à avoir créé le “neurodroit”, afin de protéger les activités issues de nos cerveaux, mais aussi éviter le “hacking neuronal”.